Bonjour, Bonsoir, Bon matin, Bonne vie, je l’espère.
Déjà, chers camarades permettez moi de vous poser une petite question : croyez vous en la fatalité ? Vous savez ce tissage invisible des parques à l’instar de chaînes à vos pieds ? Sans doute beaucoup de vous ont eu l’impression qu’un destin fatidique était à l’oeuvre lors de l’annonce de la maladie. Aussi Sartienne soit ma philosophie, c’est la première chose que je me suis dit. L’Homme rejette ce qu’il ne comprend pas, ce qu’il n’explique pas, au rang d’une intervention divine, indépendante de notre volonté, ou au facteur « pas de chance ». Même vous les athées ! ne mentez pas, vous avez certainement regardé le ciel en maudissant le connard qui vous avez fichu un crabe entre les pattes, fouillé le ciel à la recherches de causes et d’espoir. Mais chez moi, ces sentiments sont arrivés a posteriori une fois le choc des premières nouvelles estompé.
En août 2011, à quelques jours de ma rentrée en cinquième, j’ai attrapé une mauvaise grippe, à la suite de quoi, une étrange fatigue ne m’a plus quitté.
L’année précédente j’avais contracté la mononucléose mais ni ma mère ni moi ne savions qu’elle pouvait être annonciatrice des petites complications à venir. J’ai repris les cours rapidement, rejoint mes multiples clubs de sport (escrime, escalade, basket). Et très vite problème : capacité respiratoire réduite à celle d’un escargot asthmatique, fièvre, rhumes à répétition anémie et toux régulière. En trois mois je suis devenu un vrai grand père. Et encore, je crois que même mon arrière grand mère aurait pu gagner une course contre moi. Comme tout enfant je me suis plaint de mes douleurs et comme pour tout enfant, pré ado, on explique ça par la puberté, le sport, la fatigue des cours. Mon mal de dos à mon sac. Le médecin de famille a même supposé que j’étais hypocondriaque ou simplement simulateur. J’avais, selon lui, le fameux syndrome du l’école buissonnière ! Très répandu chez les collégiens. Mais je ne sais pas si tous les collégiens perdent 10 kilos en deux mois, si tous voient naître dans leur cou des ganglions de la taille de balles de golf. En tout cas si c’était de la simulation, j’étais devenu expert en la matière. Pendant ce temps là ma mère était très passive. Elle s’en occupait peu. C’est ma grand mère qui, à Pâques, a remarqué la petite boule sous ma mâchoire et ma perte de poids significative.
Elle m’a conduit chez son médecin généraliste (évidemment… pas encore légiste ) qui a trouvé ça suspect. Il m’a prescrit une prise de sang et du fer. Mais tout est allé très vite. Deux jours plus tard malaise au collège, tremblements, symptômes grippaux… Vous l’aurez deviné je rentrais dans une nouvelle ère : celle des examens médicaux. Pas douillet pour un sous, prise de sang, scanner, passent crème. L’IRM était plus inquiétant. Parce que c’était justement un IRM et qu’on ne fait pas des IRM pour rien… et Mamée le savait bien et je sentais sa peur. Bon… IRM, si on oublie l’angoisse d’être enfermé et de manquer d’air; c’est plutôt marrant. Je venais de voir Avatar j’espérais sortir de là tout bleu… Mais non. Par contre pas mal de couleurs sur les radios. Très artistique… Kandinsiky bonsoir. Artistique pour moi alarmant pour le toubib. On me parle de biopsie. On suspecte une « infection » et le scan révèle de petits amas bizarroïdes qui ont élu domicile dans mon corps. Evidemment on nous sort des petites phrases optimistes auxquelles on ne croit déjà plus « C’est sans doute béniiiin t’inquièèèèète ». Mais bon, quand c’est un oncologue qui vous dit ça…
J’ai subi sans trop de problèmes la rachicentèse (ponction lombaire puisqu’on était parti sur une leucémie aigüe lymphoblastique blablablaaa) puis le myélogramme (moelle osseuse). Je me sentais bien entre les mains des médecins. Libéré même. Car enfin il y avait des mots sur mes maux. Mon cas les intéressait. Moi qui me sentait coupable d’être mal, sans doute pour rien, moi qui pensait que c’était normal, moi qui commençait à désespérer, à trouver que si la vie c’était ça, alors je n’en voulais pas, j’avais enfin la certitude que non je n’étais pas fou que quelque chose clochait. Evidemment la ponction et toutes celles qui ont suivi, je m’en serais passé. Mais j’étais tellement rassuré de ne pas être un menteur.
Le jour du diagnostic, lors d’un beauuu mois de mai reste gravé dans ma mémoire (ben oui forcément quelle phrase bateau !). L’oncologue parlant à ma mère hébétée des prochains mois. Voire années. Des chimios, des rayons, des ponctions, des hospitalisations. Le nom de cette chose en moi « Lymphome ». Aucun de nous ne réalisait vraiment, je sentais maman crispée et j’avais juste envie de rentrer chez moi et courir rejoindre mon meilleur ami à son anniversaire. Finalement je n’y suis pas allé. Ma mère a pleuré au mot cancer, qui lui parlait davantage que le jargon médical. Les mots « protocole », puis « ABVD » et « BEACOPP » comme substantifs du mot chimiothérapie ne nous amadouèrent pas longtemps. Et je la commençais dès le lendemain. Et j’allais devoir quitter un peu ma maison aussi. Et ne pas (plus) trop aller au collège.
J’étais surpris. Mais mon inquiétude se portait sur mon frère qui allait se sentir seul. Surtout je me demandais s’il y aurait des toilettes dans ma chambre d’hôpital (réelle angoisse pour moi !). J’étais plutôt coopératif et toutes mes interrogations bizarres ont trouvé doucement leurs réponses.
Les différents médecins que j’ai rencontrés par la suite, grâce auquel le diagnostic s’est affiné, précisé, affirmé, ont tous su me mettre en confiance. Non seulement car en pédiatrie, ils sont formés pour, mais parce qu’ils ont su attiser en moi bien plus de détermination que de crainte, pourtant belle et bien présente.
Au final, j’ai cueilli le diagnostic comme le fruit de ma vie d’adolescent qui débutait tout juste. Un challenge. Un escalier à gravir. Le jour où j’ai appris que j’étais malade m’a donné la chance de grandir vite et tôt. Enfin, tout le monde s’accorde à dire que c’est un bien drôle de voyage initiatique…
Merci de votre patience car je ne fais pas dans la concision. En espérant que ce petit témoignage vous parle et en aide même certains. Je voudrais terminer en encourageant les nouveaux malades à poser des questions (enfin chacun son tempérament me direz-vous), à ne pas hésiter à confier vos craintes au personnel soignant car, bien souvent (même si pas toujours), ils sauront être à l’écoute et vous guider afin de ne pas perdre pied. Enfin, tâchez d’écouter votre corps. Si vous sentez que quelque chose cloche, ne vous arrêtez pas à un unique avis, surtout d’un médecin généraliste, faîtes vous confiance car malheureusement, un retard même de quelques semaines peut être fatal (un peu comme les règles … Si vous ne les avez pas depuis 3 mois, faut se bouger)
Et merci à la super créatrice de ce blog dont j’admire la démarche et l’implication.
FORCE A VOUS !!!!!
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