Témoignages : Retour sur le parcours de deux Warriors

En cette date anniversaire et symbolique pour moi des 4 ans de « Lymphome & Cie », je souhaitais partager avec vous deux très belles histoires. Vous avez tous une histoire avec le lymphome, et malgré les difficultés liées à la maladie, on retrouve des histoires de vie incroyables, émouvantes, et belles. C’est ça que je voulais partager avec vous aujourd’hui. Parce que l’espoir est important ! Que chaque jour vous êtes (malheureusement) de plus en plus nombreux à nous rejoindre sur ce blog, sur nos réseaux sociaux et sur notre petit groupe « Les rencontres » pour échanger entre nous. Je veux que les « petits nouveaux » pour qui c’est difficile en ce moment, qui n’ont pas trop le moral, voient que même quand tout semble compliqué, que le sort s’acharne, la vie réserve de belles choses et qu’il faut continuer à se battre, à espérer.

Le parcours de ces deux supers nanas, Manu et Clémence, je le suis depuis des années. Elles sont là presque depuis le début, un lien s’est lié à jamais. En créant « Lymphome & Cie », j’avais vraiment de rencontrer d’autres personnes avec qui partager cette maladie, nos épreuves : c’est chose faite ! Ces deux petites bretonnes (c’est un pur hasard !) sont des forces de la nature et leur détermination est sans faille. Elles avaient déjà par le passé témoigné ici même mais entre temps, leur parcours a évolué ; il fallait donc faire une petite mise à jour….

Je vous laisse découvrir leurs incroyables histoires……..

Manu :

Petite présentation rapide : je m’appelle Manu, j’ai 27 ans et demi et je suis de la team BZH. J’ai eu un lymphome diffus à grande cellule B situé sur le médiastin.

Je suis maintenant en rémission depuis presque 2 ans.

Tout a commencé le jeudi 2 mars 2017. Une voix qui déraille du jour au lendemain, une douleur à l’épaule… j’étais animatrice périscolaire dans un centre de loisirs et avoir une voix d’une enfant de trois ans, clairement j’étais pas du tout crédible. Du coup j’ai consulté mon médecin traitant. Jusqu’ici tout va bien. Puis à l’auscultation elle palpe un ganglion au niveau de ma clavicule gauche et n’entendais pas mon poumon gauche. Elle réfléchissait un peu à haute voix, me parlais d’une embolie pulmonaire mais en même temps ce n’étais pas possible vu qu’il y avait un ganglion. Donc pour se rassurer elle m’a envoyé aux urgences.

Arrivée là-bas, le check-up des examens a commencé. D’abord une prise de sang, ensuite un ECG puis une radio, un scanner et tout ça sur une journée. Beaucoup d’attente, beaucoup de questions. On voyait une masse sur mon poumon… Résultat ? Ils me gardent la nuit pour pouvoir me faire un TEP Scan et une ponction du ganglion le lendemain. Et puis, je ne sortirais pas avant le début de semaine suivante puisqu’ils décidaient de me poser une chambre implantable et biopsie du ganglion le lundi. Alors là mon cerveau a fait un stop. Mes parents, mes frères et sœur, enfin tout le monde me demandait si ce n’était pas un cancer. Et moi, innocente, encore et surtout dans le déni de tout ça. Je répondais que ce n’était pas possible parce que, comme tout le monde pense, ça n’arrive qu’aux autres…

Le vendredi on fait les examens. On me monte dans une chambre du service Hématologie / Oncologie du Centre Hospitalier de Saint Brieuc. A 18h30, le médecin arrive dans ma chambre… Et là c’est le drame… J’ai entendu les mots CANCER, LYMPHOME, CHIMIO, mais surtout, VOUS ALLEZ PERDRE VOS CHEVEUX. Aussi bizarre que cela puisse paraître, j’ai pleuré au moment où il m’a dit ces quelques mots. A ce moment, j’ai compris que je devrais me battre contre ce crabe là qui me rongeait de l’intérieur ; mais aussi garder ma féminité malgré un physique qui faisait peur. Parce que pour moi une personne qui avait le cancer était forcément blanche, sans cheveux, enfin un vrai cauchemar. Pour moi à ce moment-là on m’annonçait que j’allais mourir.

 J’étais entouré de mes parents et ma sœur ce soir-là. J’ai craqué, puis je me suis reprise. Le mode Wonder Woman était lancé.

Le lundi donc, biopsie du ganglion et pose de la chambre. Dans ce malheur j’avais une chance, c’est qu’on a pris le temps de faire une conservation d’ovocyte ; puisque les chimios altèrent la fertilité. Et dès le jeudi j’ai commencé la chimio R-CHOP.  Dans un premier temps 1 injection toutes les deux semaines. Elle a plutôt bien diminué la masse puisqu’à la base elle prenait à peu près les ¾ de mon poumon. À la suite de cette chimio on ne voyait plus qu’un quart de pris ; mais pour l’équipe ce n’était pas assez, donc hop deuxième ligne de chimio R-DHAC. Cette fois ci ça a été 4 injections séparées de 3 semaines chacune. Même diagnostique que la première donc ils ont voulu changer de méthode. Le produit s’appelait du Pembrolizumab ; c’est un traitement pour les mélanomes mais comme j’étais réfractaire aux chimios ils ont voulu tester. Franchement le résultat a été plus que catastrophique puisque la masse a doublé de volume ; elle ressortait maintenant de mon torse et mes douleurs dans l’épaule étaient revenues. J’aurais aimé à ce moment qu’on m’arrache le bras ! Un vrai coup de massue. Mais mon hématologue étant très réactif, il a contacté l’institut Gustave Roussy à Paris pour entrer dans un essai clinique. Le traitement se composait de deux médicaments : du Tazémétostat et de la Prednisolone. Une fois de plus aucun résultat sur moi. Donc passage à la radiothérapie à la clinique de Plérin: 40 gray sur 20 séances, une tous les jours. Associé à ça, de la chimio R-ICE. Et miracle ça fonctionne ! Alors pour consolider tout ça, en route pour une allogreffe au service Angela Duval de Rennes avec ma sœur comme donneuse qui est compatible à 100 %. Tout se passait bien jusqu’à ce que des démangeaisons apparaissent … ce n’était pas un rejet mais le lymphome qui revenait. Ce coup-ci au niveau de la mâchoire. Un abcès a grossi et a déformé ma mâchoire, mon visage. Nous avons opté pour la radiothérapie ciblé à Eugène Marquis à Rennes et en 20 séances plus rien à la mâchoire mais par contre il s’était déplacé au niveau du foie, des poumons et un peu les os.

Avec tous les traitements que j’avais déjà eu, ils ne savaient plus trop quoi faire pour me soigner et surtout que je ne récidive pas. Comme la médecine évolue souvent avec de nouveaux traitements qui arrivent sur le marché français, nous en avons trouvé un qui se disait révolutionnaire ! Alors en route pour Nantes, avec un nom plutôt mignon je trouve les CAR T CELLs. Révolutionnaire certes, mais clairement, en apprenant les effets secondaires que ce traitement pouvait engendrer, il était tout de suite moins mignon. Mais de toute manière c’était ça ou alors du bidouillage de chimio et mon corps n’aurait (je pense) pas supporté. Résultat ?? je suis en rémission depuis deux ans grâce à lui ! C’est l’hématologue de Nantes qui me l’a annoncé au mois de Mai 2020.

Je pensais vraiment que je serais tranquille après avoir vécu tout ça ; mais c’est sans compter sur mon petit corps de Warrior qui ne fait jamais comme tout le monde. Il a voulu dire « Stop ! j’en ai marre ! lâche-moi ! » et m’a sortie un méga zona sur la moitié de mon visage qui m’a value 10 jours d’hospitalisation sous perfusion. Là-bas j’ai attrapé un petit microbe aux poumons. Petit ? Oui mais à moi il m’a fait tellement de mal. C’est d’ailleurs lui qui m’a plongé une semaine dans le coma puisque j’ai fait une pneumonie : Intubation ,réanimation,rééducation … réapprendre à respirer seule, à marcher … Qui aurait cru qu’un jour, du haut de mes 26 ans je sois obligée de réapprendre tout ça ?

Et sans le savoir ce n’était que le début de la vraie galère … J’ai perdue tellement de kilos que je n’arrivais plus à tenir debout. Mes poumons étaient tellement fragiles que j’attrapais n’importe quel virus de passage dès que je sortais de l’hôpital. Mon estomac n’a pas trop apprécié non plus que je lui fasse des changements de rythme alimentaire, donc il a décidé de ne plus accepter aucun aliment, ce qui a engendré la pose d’une sonde GPE pour une alimentation parentérale la nuit. Ma chambre implantable a dû être retirée en urgence car un germe s’y était incrusté ; alors que pendant 3 ans et demi elle avait toujours été là pour moi, elle faisait partie de moi. Bref un an de galère … Je crois que j’ai passé autant de temps à l’hôpital que chez mes parents. Je parle de vrai galère puisque, pour moi le cancer en lui-même et ses traitements ne m’a posé aucun problème sur ma vie quotidienne pendant presque un an.

Le petit plus c’est que le personnel soignant était vraiment super génial, ils ont toujours été à mon écoute et je crois que je ne pourrais jamais les remercier assez pour ça.

Aujourd’hui, à l’heure où je vous écris ce témoignage, nous sommes le 2 mars 2021. Alors cela fait jour pour jour 4 ans que je suis entré dans cette communauté des « cancéreux ». Même si je n’en suis plus une, au fond de mon cœur, au fond de mon être, je ne pourrais jamais oublier cette période. Pas toujours drôle, ça c’est sûr. Et encore maintenant j’en subi les conséquences, aussi bien physiques que psychologiques. J’ai fait une dépression en 2018 jusqu’à cet été à peu près car il m’a fallu faire le deuil de ma vie d’avant. Je disais au revoir à mon énergie à toutes épreuves ; à mon corps voluptueux puisque j’ai perdu plus de 20 kg, et je suis donc sondée la nuit ; à une partie de mes capacités pulmonaires car aujourd’hui je n’utilises plus que 20% de mes capacités et par conséquent je suis sous oxygène la journée et j’ai une VNI (ventilation non invasive) la nuit.

Dit comme ça, la rémission n’a pas vraiment la saveur que j’espérais tant ; mais voyons le positif car c’est ce qui m’a toujours tenu debout. J’ai ouvert les yeux sur les gens importants de ma vie, je profite des petits plaisirs que peu m’offrir cette nouvelle vie. J’ouvre les yeux tous les jours en disant merci ! Merci de voir une journée de plus le soleil le matin, car tellement de mes ami(e)s de la communauté nous ont quitté. Alors rien que pour eux je veux me battre et montrer au monde que non, le cancer ne gagne pas à tous les coups.

Aujourd’hui, pour les 4 ans de combat, je me suis fait tatouer. Ça a toujours été pour moi les marques de ma vie les tatouages ; mais celui-ci en particulier est symbolique. Une Wonder Woman, puisque ma cousine m’a appelé comme ça depuis le début et d’autres s’y sont mis aussi. Je m’y suis donc reconnu. J’ai eu la chance d’avoir en plus une super tatoueuse pour me la faire, elle a compris ce que je voulais faire passer dans ce tatouage. Elle a su le retranscrire en dessin et ça c’est un travail de chef.

Bref, je ne suis pas sortie d’affaire c’est une certitude. Ma vie ne sera jamais plus la même mais, une chose est certaine, c’est qu’aujourd’hui plus que jamais je connais la valeur de vivre, de respirer, de marcher. Et personne ne pourra se mettre en travers de mon chemin puisque même le cancer a eu peur de mon petit corps de moustique.

Ps : Ne doutez jamais de vous ! Croyez en vous et votre corps ! mais écoutez le car sans la santé, on a rien.

https://lymphomeetcompagnieblog.fr/2018/01/22/interview-n32-emmanuelle/

Clémence :

Après 8 longs mois de douleurs et d’errance médicale, j’apprenais mon lymphome B à grandes cellules en avril 2016. J’avais 27ans.

Il fallait me soigner rapidement alors aucune préservation de fertilité n’a été possible en terme de temps. C’était ma seule obsession, au delà de la guérison ! Mon grand projet 2016 allait être repoussé, modifié, je ne connaîtrai jamais un enfant de moi, avec mes yeux…et pour moi, c’était de la faute des médecins que j’appelais à l’aide depuis des mois.

Après seulement 5 mois de traitements avec son lot de hauts et de bas (dont une autogreffe), j’étais en rémission. Obsession bébé en tête, j’ai direct foncé chez ma gynéco pour faire le point et, je le savais mais les examens l’ont confirmé : stérilité chimio induite. J’ai attendu un don d’ovocytes pendant 3 longues années… qui, avec le recul, étaient complètement nécessaires pour faire le deuil de mes « mini moi ».

Aujourd’hui, ma fille a 6 mois et même si ma gorge se noue lorsqu’on me dit qu’elle me ressemble, je pleure encore parfois quand je la regarde. Je vois en elle l’incroyable générosité de la fée grâce à qui elle est là aujourd’hui, je revois tout ce parcours, et je remercie presque le lymphome de m’avoir permis de savoir à quel point elle est précieuse !

Elle est l’ultime conclusion de cette [finalement belle] aventure. Le lymphome m’a ouvert les yeux sur l’urgence de vivre, sur la générosité de certaines personnes, sur l’entraide entre survivants, et je souhaite à tout les Warriors qui nous rejoignent d’en sortir aussi bien que moi.

Bonus : J’ai commencé à trainer sur internet pour chercher du soutien, des gens comme moi, là où les proches, même avec beaucoup de bonne volonté, ne peuvent pas comprendre. Le Forum de FLE, la page Lymphome & Cie… Nous étions entre nous, nous nous comprenions, cela m’a fait tellement de bien, qu’après la fin des traitements, je suis restée pour essayer de rendre la pareille. Malheureusement nous sommes toujours plus nombreux et je ne sais pas si j’ai pu aider autant que j’ai reçu. Parfois j’ai besoin de prendre du recul sur mon histoire, mais grâce à Noémie, que j’ai pu rencontrer pour de vrai, j’ai mis un pied chez FLE, et j’espère mettre en place une permanence dans mon département. Un jour, j’aurai peut-être d’autres préoccupations et alors, j’arrêterai. Mais même si cela ne doit être que temporaire, j’aime l’idée de l’entraide entre malades…qui mieux que nous peut nous comprendre ? « 

https://lymphomeetcompagnieblog.fr/2018/01/29/interview-n33-clemence/

Laissez moi votre commentaire et si vous aussi vous souhaitez témoigner et nous raconter votre histoire, contactez moi par mail à lymphome.compagnie@gmail.com

Un commentaire sur “Témoignages : Retour sur le parcours de deux Warriors

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  1. Bravo Emmanuelle pour ce témoignage. J’ai toujours admiré ton courage. Je te souhaite la guérison de cette s***perie. Reste comme tu es. 😘

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